Les Séries policières à l’épreuve du CSA…
Depuis sa création en 1989, le CSA (Conseil supérieur de l’Audiovisuel) a, entre autres missions, celle de veiller à la protection du jeune public.
En novembre 2010, le « gendarme de l’audiovisuel » a publié une étude sur la Protection de l’enfance et de l’adolescence à la télévision, à la radio et sur les services de médias audiovisuels à la demande, dont le premier point rappelle notamment la signification de la signalétique jeunesse mise en place sur les chaînes et la campagne publicitaire qui s’y rapporte et qu’on peut voir actuellement sur les écrans.
Une occasion de mettre à jour nos connaissances des recommandations du CSA et de tester, programme TV d’une semaine de novembre en main, dans quelle catégorie + ou – toxique sont classés nos programmes TV préférés.
Fiction avant tout…
Sauf exception, la plupart des magazines d’enquêtes et de faits divers ne passent pas le test du -10 ans. Comme si l’enquête et la résolution d’affaires réelles (même si spectaculaires) étaient plus traumatisants que les délires de notre imagination, pire les délires de l’imagination d’un scénariste !… Voilà pour : Faites entrer l’Accusé, 90’ Enquêtes, Affaires criminelles, Indices (?), Les faits Karl Zéro, Crimes, justice et vidéo (?), Sur la scène du crime (?) et même Les Enquêtes impossibles de Pierre Bellemare !
Côté Séries, bonne nouvelle, les grands classiques américains de notre enfance tels que : Amicalement Vôtre, Les mystères de l’Ouest (oui, oui, ça repasse ! Pour les fans, c’est tous les jeudi et vendredi sur Paris Première, en tout début d’après-midi), l’Agence Tous Risques, mais surtout Max la Menace (tous les jours sur Arte à 12h20) sont toujours « tous publics ». Trop cool ! Ravie de constater « Preuve à l’appui », si j’ose dire, que mes parents ont en leur temps rempli leur mission de protection des mineurs…
Sans surprise également, Columbo, Arabesque ou Monk sont jugés inoffensifs (même si pas inefficaces !). De même Veronica Mars, JAG, FBI Portés disparus et plus curieusement, Desperate Housewives qui, sans être à proprement parler une série policière, accumule depuis des années intrigues criminelles et mauvaises pensées en tous genres chez des gens visiblement bien sous tous rapports, au point de ruiner durablement notre confiance naturelle dans nos propres voisins… Tu parles d’un contenu préjudiciable !
En novembre toujours, à Toronto, Teva accorde aux bleus de Rookie Blue leur permis d’enquêter à toute heure de la journée. Car si chaque chaîne constitue son propre comité de visionnage pour mettre en œuvre dans ses grilles les recommandations du CSA, l’heure de la diffusion (journée, prime time, après 22H00), la proximité directe avec une émission pour la jeunesse ou les veilles de congés scolaires ou de week-ends sont théoriquement règlementés.
Pour ce qui concerne les séries françaises, les Bœufs-carottes ou Maigret – même quand il est programmé à 2h00 du matin ! – sont définitivement déclarés indolores (il me semblait bien aussi !). Et dans leur sillage s’engouffrent, en vrac : Navarro, Diane femme flic (!!!), Julie Lescaut, Une Femme d’Honneur, P.J., ou Central Nuit, Alice Nevers et Frank Riva, ainsi que les Bleus, premiers pas dans la police. Au moins, on sait où on en est !
En Europe, côté anglais, Les Souvenirs de Sherlock Holmes, Hercule Poirot, Les Piégeurs (?) et même Meurtres à l’anglaise sont considérés sans risque, comme Brigade du Crime, Peter Strohm ou Alerte Cobra (la police des autoroutes !), côté allemand.
Déconseillé aux moins de 10 ans : « scènes susceptibles de heurter »…
Les recommandations du CSA pour la protection du jeune téléspectateur contre les contenus préjudiciables ne nous concernent évidemment pas directement, nous, adultes et fans de séries policières. Pour autant, certaines classifications sont réellement étonnantes…
Ainsi, dans la catégorie des -10 (« Scènes susceptibles de heurter »), Esprits criminels, qui met en scène et en images uniquement les crimes de tueurs en série à partir d’une très large documentation réelle côtoie les Experts: Miami (vaste blague !) ou le gentil Mentalist. Medium, Profiler, Cold Case, Prison Break, Damages et 24h Chrono sont logés à la même enseigne que Lie to Me ou Shark. La série américaine N.I.H. : alertes médicales, spécialisée en bubons et épidémies en tous genres (vraiment flippant !) se retrouve face aux Spécialistes parmesans (!) de l’investigation soporifique scientifique, tandis que, côté anglais, Les enquêtes de l’inspecteur Wallander ou Scotland Yard crimes sur la Tamise sont jugés aussi « shocking » que Les mystères de Sherlock Holmes ou Inspecteur Barnaby. Sans parler du suédois Contre-enquête dont l’excentrique personnage central, professeur de droit criminel, ruine immédiatement dans nos esprits tous les efforts de ses étudiants pour sauver des innocents…
Et comparez par exemple le ton général de la série britannique Autopsie, dont les images sont effectivement très dures, le respect pour les corps qui y est montré, et les autopsies grand guignolesques du Dr. Donald « Ducky » Mallard dans NCIS couplées aux brimades incessantes et aux blagues graveleuses du dragueur Di Nozzo : où est l’obscénité, à votre avis ? Et pourtant, à NCIS le prime time du vendredi soir sur M6 et les audiences record en France comme aux Etats-Unis…
On trouve les différentes versions des Experts ou de NY District à la fois dans les -10 et les -12 comme comportant des scènes susceptibles de heurter ou selon, recourant de façon répétée à la violence physique ou psychologique et/ou banalisant la consommation de drogue ou d’alcool. Certains épisodes sont évidemment plus violents ou plus marquants que les autres et l’heure de programmation fait sans doute la différence, mais on le voit bien, les critères mis en avant par le CSA et les recommandations appliquées notamment aux séries policières sont trop insuffisants ou vagues pour assurer un cadre efficace aux enfants et aux adolescents.
Pas sûre d’ailleurs que Marcel Rufo approuve ma fascination pour les séries policières ni le temps que je passe chaque jour devant la télé !
Violent, le Commissaire Moulin ?
Curieusement, en matière de séries TV (même policières !), -12 est le mieux qu’on puisse trouver en terme d’interdiction pour des séries comme Shattered, The Shield ou 24H chrono, les interdictions de -16 et -18 couvrant respectivement les programmes érotiques et pornographiques d’une part, les « films de grande violence » d’autre part, et de manière générale les films de cinéma, plus que tout autre type de programme.
Les séries françaises Engrenages, Mafiosa et Commissaire Moulin s’y retrouvent aussi…
Si j’avais du courage, je m’intéresserais à la nouvelle version du Commissaire Moulin, pour vérifier en quoi ce -12 est justifié. Dans la version de mon enfance, rien ne justifiait certainement ce classement, à moins que… le slip bleu peut-être ?