(Trop) court séjour sur l’Ile des Morts…
Situé au nord de Venise sur la route de Murano, l’île de San Michele abrite le cimetière de la Cité des Doges, une quinzaine d’hectares entourés d’un long mur de briques couleur abricot, qu’on rejoint en vaporetto depuis Fondamente Nuove ou en « bateo funebre » pour un aller sans retour.
Autrefois, les Vénitiens enterraient leurs morts sous les dalles de la ville ou dans de petits cimetières paroissiaux, ce qui n’était pas sans poser problème lors des épisodes de peste ou d’acqua alta. Aussi Napoléon imposa-t-il en 1804 le projet d’un cimetière hors la ville réunissant les deux petites îles de San Michele et San Cristoforo della Pace et nommé d’après l’Archange Michel, saint patron du catholicisme, auquel l’église du 15ème siècle était consacrée.
C’est Gian Antonio SELVA, l’architecte de la Fenice, qui mena à bien le projet, terminé en 1836.
Quant à la statue représentant deux hommes sur une barque pointant du doigt vers le cimetière, c’est un ajout relativement récent, puisque « La Barque de Dante » sculptée dans le bronze par le russe Georgy FRANGULYAN a été installée dans le lagon pour la Biennale de 2007 où elle est restée depuis.
Guidés par Dante et Virgile, approchons-nous donc de « l’Ile aux Morts »… pour atteindre l’harmonie du cimetière…/rejoindre le séjour des morts
Visite de l’Ile aux Morts…
Entrés en longeant l’ancien monastère qui jouxte l’église San Michele in Isola toute blanche, on découvre bientôt la structure particulière du cimetière, composé de différents « carrés » : le carré des enfants et le columbarium, le carré des militaires ou celui des gondoliers (!), celui des orthodoxes, des protestants, et ceux – les plus nombreux – réservés aux catholiques, chaque parcelle étant entourée de murs sur lesquels sont adossés les tombes familiales monumentales…
L’espace étant relativement restreint, la durée d’une concession est généralement limitée à 12 ans, après quoi les ossements sont incinérés ou transférés dans des ossuaires situés sur le continent. Le cimetière de San Michele à Venise accueille donc des morts récents, encore très présents dans la mémoire de leurs familles et c’est ce qu’on ressent en s’y promenant. Les tombes sont fraîchement fleuries, entretenues, régulièrement visitées.
A l’intérieur des parcelles, les tombes s’alignent régulièrement sur l’herbe verte, jouant avec le soleil. Des médaillons photo permettent de faire connaissance avec les morts, voire avec toute la famille, comme sur les tombes monumentales situées sur le pourtour. Taillés dans la pierre, de fiers messieurs à moustache posent à côté d’épouses à la tenue impeccable et aux sourcils froncés…
Entouré d’eau, de murs, de hauts cyprès, le cimetière de San Michele est un havre de paix et de silence. En passant de « chambre » en « chambre », on finit évidemment par se perdre et j’imagine qu’on peut facilement y passer la journée, à la rencontre des vrais Vénitiens et des quelques personnalités étrangères – les VIP ! – qui y sont enterrées…
On y trouve notamment les tombes :
- du poète américain Ezra POUND dans le carré N°15 dit « Evangelici », réservé aux protestants et aux étrangers
- du compositeur russe Igor STRAVINSKY dans le carré N°14, dit des « Greci » ou chrétiens orthodoxes
- ou encore de Serge DIAGHILEV, impresario, organisateur de spectacles et fondateur des Ballets russes, également dans le carré N°14.
La magnifique gondole funèbre de 11 mètres de long ou « barca dei morti » poussée par 4 gondoliers en tenue n’est plus utilisée depuis les années 1970, remplacée par un plus prosaïque bateau à moteur, mais un appel à souscription a été lancé pour en construire une réplique et restaurer cette spectaculaire tradition du cortège funèbre vénitien.
Avez-vous fait des visites ou des rencontres insolites à Venise ? Partagez-les dans les commentaires !
Merci de nous faire découvrir cet endroit à l’ambiance particulière. Je ne suis jamais allée à Venise.
Et merci de m’avoir lue, Hilde ! Comme énormément de choses à Venise, le cimetière ne pouvait être que particulier ! La prochaine fois (s’il y en a une !), j’aimerais aller visiter le cimetière juif sur l’île du Lido. C’est aussi là que se trouvent les plages de Venise, a priori pas données !